mercredi 9 mai 2012

Moi qui cherchait l’aventure ailleurs, je n’avais pas compris que l’action se déroulerait chez nous. Voilà que ce voyage achève d’achever, et que je pourrai venir participer à l’implosion qui nous secoue. Je ne cache pas la fierté que j’ai éprouvée à vous voir aller, tous debout, jours après jours. Le Québec est en train de changer, et je crois qu’on était nombreux à vouloir et espérer ce changement.

Je vous écris ce texte à un jeune 6h am, de Surathani, après avoir pris un autobus de nuit parce que notre train a été annulé suite à un déraillement. Je commence à en avoir plein le cul de ces transports, même si c’est une prérogative au voyage…je vous jure que je ne m’ennuierai pas de constamment me sentir en danger de mort, malgré que c'est souvent dans les transports qu'on peut se sentir aussi proche des locaux.

Quand j’ai quitté Montréal, je crois que je ne m’étais jamais sentie aussi bien dans ma vie. C’était entre autre grâce à Pier-Philippe, qui naturellement, sans même chercher à le faire, à poser un baume de bonheur sur ma vie avec ce don qu’il possède d’aspirer tous les gens qui l’entourent vers l’avant. En arrivant au Viet Nam, je me suis fortement demandée pourquoi je quittais tout ça. J'avais vraiment envie de ce voyage, mais je me trouvais mal timée. Alors, pourquoi ce départ? Faut-il vraiment le savoir?

On vient pour s’imprégner de l’inconnu, du plus ou moins connu, et même du connu. On vient aussi pour revenir, naturellement. Mieux revenir comme ils disent. Personne ne veut mal revenir. Les mal revenants partiront à perpétuité, en ne sachant plus comment se poser. On en a croisé quelques-uns qui se perdaient à vouloir trop se chercher.

Mais partir, c’est aussi confronter son confort, c’est s’écarter le coeur sur la réalité du monde extérieur, tenter de la cerner pour s’en nourrir. Partir, c’est aussi prendre conscience de ce qui nous manque chez nous. C’est surtout prendre conscience de l’infini valeurs des gens que l’on côtoient. Ça sonne cul-cul, mais c’est ça pareil.

Partir, c’est aussi se déniaiser. C’est se renforcir tant au niveau du corps que de l’esprit. C’est passer de longues heures de solitude avec soi-même pour réfléchir, réfléchir et réfléchir. Il est rare de s’accorder 3 mois dans un tout-inclus avec soi-même. Bref, ça brasse la cage de bien des façons, même que ça change des perspectives qui étaient lourdement conditionnées.

Je vous souhaite de partir.

On se revoit à Montréal...merci de m'avoir accompagnée.

mercredi 25 avril 2012

J’essaie de vivre dans un pays qui n’a pas encore eu l’étrange privilège ou la damnation d’être modifié totalement par le tourisme. Le résultat est qu’il y émane une vérité, comme une aura incapturable. Le Myanmar est pur, oh oui! Ça se remarque chez les Birmans, qui sont encore surpris de voir des étrangers. Ils nous saluent avec tout ce qu’ils ont de bras et de mains et nous sourient pour nous exposer leurs dents pleines de bethel. Ils sont beaux!

Ça se résume en un besoin de communication de leur part, nous voir, nous demander d’où l’on vient, où l’on va. Leur sens de l’humour est en constante dilatation. Ça se voit et ça se sent, ils aiment avoir du plaisir, ils s’apprécient et peut-être même qu’ils nous apprécient. Ce qui frappe aussi, c ’est leur transport. On a pris un pick-up pour se rendre dans une ville voisine avec des locaux. Le pick-up aménagé a 20 places...oui, oui, 20 places dans un petit pick-up, pas un gros pick-up américain de chez nous. Se rajoutent des gens qui se tiennent en arrière debout... Il y avait une dame de 85 ans qui s’accotait légèrement sur moi, elle n’avait même pas l’air d’un peu se plaindre.

La vérité du Myanmar, elle se capture aussi à travers un paysage pur, authentique, qui vit par lui-même. On y voit de longs étendues vierges parsemés de villes où poussent des temples. La chaleur écrasante nous oblige à prendre conscience du soleil, un soleil presque divin, je le jure sur la tête de Dieu. Ici, le soleil nous lève a 5h. J’ai l’impression de me retrouver dans un film de Terrence Malick. Comme quoi la réalité peut dépasser la fiction. D’ailleurs, on a fait un trekking de trois jours dans des endroits qui ne se foulent qu’à pied. Je n’ai jamais vu de paysages aussi grandioses et variés. En une soixantaine de km, on a vu de l‘eau, des déserts rouges, des montagnes escarpés, des vallées luxuriantes. On a eu l’impression de visiter huit pays différents.

Le Myanmar, c’est ne pas s’étonner de voir des enfants travailler, comme si c’était leur devoir familial. C’est aussi le devoir, pour une femme, de se couvrir les épaules et les jambes alors qu’il fait 40 degrés. Cette pudeur est étrange à saisir…on a vu des mères allaiter en pleine rue devant les hommes, en déballant littéralement leurs attributs. Ma conscience occidentale a de la difficulté à mesurer l’étendue de tout ça, surtout que les hommes ne se gênent pas pour se promener torse nu et pour remonter leur pagne bien en haut des cuisses.

Comment un peuple gouverné par des militaires peut avoir l’air si saint et heureux? Voilà une question riche en choses cachées. Comme vous avez pu constater , le pays pose un premier pied dans notre si chère démocratie avec leur nouvelle députée Aug San Suu Kyi. Je peux vous certifier qu’ils l’assument en pleine rue, qu’ils n’ont guerre l’air d’avoir peur de le faire. Des Birmans portent des chandails à son éffigie, les chauffeurs de taxi affichent sa photo dans leur vieu bazou. ( pas le droit d’acheter un char neuf ici, ce qui donne un petit air de Havane). Il n’est pas rare de croiser son visage.

Les droits de l’homme ne demeurent pas les mêmes ici, mais comme je vous disais, ces persécutions semblent assez étouffées et cachées, probablement encore plus pour un oeil extérieur. Je sais entre autre qu’il y a beaucoup de prisonniers politique qui sont utilisés dans la construction de projets. Ça se note aussi dans des trucs simples. Par exemple, il m’était impossible de publier sur le blogue à partir d’ici. J’ai failli faire affaire avec mon ambassadeur birman au Québec.

Le Myanamr, c’est un voyage immersif. C’est certainement ce qui m’a le plus marquée, et j’avoue que le trekking que nous avons fait en montagne m’apparaît déjà comme un espèce de rêve flou où j’ai délirée…ça ne pouvait pas être aussi beau. Je n’oublierai jamais les gens que nous avons côtoyés, surtout notre guide Phung Cho et mon si cher U San Win, qui m’a littéralement sauvé à travers une histoire que je ne raconterai pas maintenant...trop éprouvant! Une autre fois.

jeudi 5 avril 2012

Ce soir, dans Les aventures de Lolo et Gege : Le fameux Myanmar!

Laurence se repose dans la chambre suite à une migraine déclenchée par cette journée éprouvante de chez éprouvante, ciboire!

Je vous ramène un peu en arrière. Il fallait obtenir notre visa pour le Myanmar...toutes excitées de découvrir ce pays presque inexploré par les touristes. Résultat : on se rend à l'ambassade du Myanmar à Hanoi pour faire notre visa. Sur place, une femme enceinte terriblement désagréable, à qui on fait durement la morale (elle le méritait, la mégère!) finit par nous dire que ça nous prend 300 affaires pour faire notre visa. Affaires du style : Lettre de l'employeur qui confirme qu'on a une identité et qu'on voyage, photos d'identité, confirmation de l'hôtel, etc. Plus, elle nous spécifit qu'on doit faire le visa de Bangkok, vu que notre vol décolle de là. Ok, ok, ok, on va faire tout ça!
 
 
 


À Bangkok, on se rend à l'ambassade de peine et de misère avec nos papiers précieusement conservés. On marchera pendant deux bonnes heures avec nos sacs beaucoup trop lourds sur le dos (on voulait quitter la ville après). Un boat bus et un sky train de déplacement, plus ben ben de la marche et beaucoup de Thais qui nous donnent des indications erronées, ce qui nous fait remonter et redescendre la plateforme du sky train trop de fois pour que mon orgueil s'en vante.

On finit par y arriver. Tout se passe bien à l'ambassade. Comme deux filles prévoyantes, on s'assure auprès de la Madame Responsable que l'ambassade est bien ouverte la journée où on doit repasser. À quatre reprises, elle nous dit que oui. C'est ainsi qu'on part se prélasser quelques jours sur la plage de Hua Hin, à quatre heures de Bangkok.

Le 4 avril, Laurence décide d'amener un livre de collection sur Bangkok à la plage, histoire de voir. Le livre était endommagé par la pluie, il pourrissait légérement et Laurence était passée à un doigt de le jeter. Par un hasard assez spécial...que nous chérissons à mains jointes aujourd'hui, elle décide de regarder les jours fériés en Thailande. Le 6 avril est férié, journée où on doit récupérer notre visa (un vendredi).

Scandale! Les ambassades sont fermées les jours fériés! On vérifie avec l'hôtel, j'appelle même d'autres ambassades pour être certaine (vu que celle du Myanmar ne répond pas). Ai-je mentionné que l'ambassade est fermée le samedi et le dimanche, et que notre vol est le 8 avril (dimanche). Rapido presto, on se rend à la gare, on achète notre billet de train pour revenir à Bangkok le 5 avril au matin.

Lendemain matin, on est à la gare à 5h30 am...notre train part à 6h am. Rappelons qu’on a presque pas someillées, pendant la nuit, on divaguait sur l'avenir de l'humanité, et sur notre avenir par le fait même.
Le train à 1h30 de retard...on embarque finalement, on arrive à Bangkok autour de 11h30-12h. On se prélasse un peu dans la gare (air climatisée), en se disant qu'on partira vers 14h30 en taxi pour l'ambassade. Elle est ouverte de 15h30 à 16h30. Oui, oui...une heure seulement.

On embarque dans un touktouk pour sauver un peu de nos précieuses économies. Le chauffeur a tellement l'air de savoir où il va, que je lui confirais les clés de mon char. Rappelons aussi que je lui mentionne clairement l'adresse et que je lui pointe sur la carte exactement où c'est, en spécifiant la position de l'ambassade par rapport au sky train. Heureuses, on ne se concentre plus sur la route.

On se rend compte peu à peu que notre chauffeur est quelque peu déficient, qu'il n'a pas l'air de savoir où il va. On commence à être sur les nerfs, il est passé 15h30. Bangkok, c'est une sacré ville soupoudrée de chaleur, de trafic, de rues écrites en Thai, etc. Laurence et moi, on ne sait plus où on est ( Pier-Philippe, où es-tu lorsque j'ai besoin de ton don de cartographie mentale?). Je vous passe tous les dialogues avec le chauffeur, on capote, on lui répète 300 fois c'est où en disant : Do you know where we are right now...SHOW US!?

Je finis par me pitcher du touktouk pour entrer dans un dépanneur demander le chemin (réflexe québécois). Un monsieur vient expliquer en Thai au chauffeur c'est où. Laurence est presque en train de l'agripper pour qu'il vienne avec nous. Comprenez que si ça foire, on est vraiment dans la marde....notre vol est le 8, il faudra perde 200 $ chaque et déplacer notre vol. 200 $ pour moi, c'est deux semaines de vie en voyage et plus....

On arrête d'autres chauffeurs de taxi en pleine rue pendant qu'on roule en leur demandant où est le chemin.  Lancer les sacs hors du touktouk en pleine rue passante était aussi une des options, comme appeler l'ambassade du Canada pour dire...pour dire quoi, à ceux-là?

Les deux, on commence à être sur le bord du gouffre de l'angoisse, il est presque 16h...notre chauffeur est fou. Il fait des manoeuvres dangereuses qui manquent de nous éjecter du touktouk. Par un miracle, on finit enfin devant l'ambassade, le mal de coeur de stress montait en nous. La pression se dissout d'un coup. On récupère notre visa, en chialant que cette Madame chose nous a dit que l'ambassade était ouverte. On sort de là, on reprend le sky train, on reprend le bateau, on trouve un hôtel, la migraine attaque Laurence.

C'était stressant, bien stressant. Elle vient de redescendre, toute fraîche, on aura mérité notre Myanmar!

P.S Le bébé, c'est notre nouvelle amie. C'était pour bien terminer ce texte, et pour donner du joli au stress vécu!

lundi 2 avril 2012

Des enfants trop beaux pour être vrais barbotent dans une mare laissée par la marée. À l'horizon, une vingtaine de kyte et leurs acrobaties aériennes hyptotisantes. Des milliers de minuscules crabes s'affairent à rendre le sable plus fin en le mâchant, puis en le remâchant.

Depuis la matinée, et depuis quelques matinées d'ailleurs, des farangs défilent devant nous. Farang, c'est le mot thai pour dire étranger. Le farang, c'est aussi cet occidental trop blanc qui déambule avec cette thai trop belle. Ça frappe.

Le gros gras blanc et la belle thai à la taille fine et au teint caramel. Elle sourit presque trop, la chère. On ne les compte même plus ces couples, ça pullulent. Loin de moi l'idée de mettre tous ces hommes dans le même panier, je sais bien que quelques-uns de ces couples s'aiment de ce qu'on appelle l'amour, mais il y a quelque chose de louche, de dérangeant même.

La prositution en Thailande n'est pas tabou. Il paraîtrait qu'il n'est pas rare qu'un jeune thai perde sa virginité dans un salon de massage, où les filles sont souvent étiquetées avec de vraies numéros, dans une vraie vitrine, pour le plaisir des messieurs (je vais prendre la # 2, qu'il se dit, lui).

Ils viennent ici se soulager la braguette et semblent louer la fille pour une période x. Des incognitos en quête d'exotisme. Des hommes seuls qui ne pognent pas, mais qui achètent. C'est surtout cette grande solitude, c'est ce que ça sent le plus.

-Mais Geneviève, la prostitution est le plus vieux métier du monde, ce n'est pas surprenant, tout ça.

Il paraîtrait aussi que bon nombre de ces filles viennent des campagnes, qu'elles sont démunies, qu'elles doivent faire vivre une famille, et tout le tralala. Bref, rien d'amusant et assez internationale comme situation. Ne parlons même pas des difficultés rencontrées pour s'exiler de ces réseaux. Seul le 30 ans qui approche est salvateur.

Savez-vous quoi? Il paraîtrait aussi que la prostitution chez les enfants s'est estompée en Thailande pour rejoindre des pays plus pauvres comme le Laos et le Cambodge. Vous en pensez quoi?

mardi 27 mars 2012

Je sais...ce blogue s'éparpille assez déjà, mais j'y pense aussi à cette grève.



Rouge
d'avenir
mon ventre
        saigne
les funicules
de l'existoire

des milliers
de fanaux
rougissent
l'air
        brûlant
se pollinise
se poétise
se politise

les cerveaux
imbibent
les rues
        fissurent
le sol
     tremble

s'y logent
nos chairs
        écarlates
forment
la masse
        mouvante
où coagule
notre force
        manifeste
à tue-tête

je marche
sous ton ciel
impénétrable
        opaque
du murmure
qui claque
la langue

l'haleine
s'écrit
        et crie

l'homme
est l'avenir
de l'homme

Geneviève Gosselin-G.

samedi 24 mars 2012

Je pensais à l’excellent site poème sale ( merci à mon ami Charles Singher) : http://poemesale.com/

Le Vietnam, c’est une poésie sale où ‘‘le beau embrasse le terrible”. C’est le paysage à couper le souffle de la Baie d’Along jonché de déchets. C’est l’eau limpide d’un vert impossible détrampée de plastique. C’est aussi voir une femme descendre ses culottes dans la rue pour se soulager sans se soucier des spectateurs.

Le Vietnam, c’est de nombreux infirmes et blessés portant le poids de la guerre, et d’autres qui continuent à se déformer par l’agent orange américain. Grouille des résistants qui vivent dans l’ici et dans le maintenant. C’est un peuple d’assassinés qui acueille le tueur en souriant. L’argent ne court pas les rues et n’a toujours pas remplacé Bouddha.

Le Vietnam, c’est un pays indépendant depuis 1945, et croyez-le ou non, il s’est presque décolonisé. C’est un Québec d’il y a 50 ans explosé de cellulaires et de télévisions. C’est l’air saturé de gaz à moteur et l’air infini des montagnes.

Ça sort de la norme, c’est unique, ça fait son chemin, son propre chemin, c’est une poésie des contrastes, et croyez-moi, elle est sale, brute et se pavane.
Voyager, c’est aller au devant de peurs infondées. C’est se battre contre l’ignorance pour avancer du côté de l’ouverture d’esprit. La peur est aussi habitée du désir. Désir d’aller vers l’autre, de vivre l’expérience qui transforme. Et ça fonctionne…on réalise que nos peurs sont des épouvantes d’enfants, mais encore, on vit de nouvelles peurs, bien vivantes cette fois-ci.

On s’est rendues sur l’île aux singes (habitée par des singes). On a eu toute une frousse lorsque les singes se sont mis à poursuivre les gens et à aggriper leurs chevilles, en faisant comme s’ils allaient les mordre. Ça n’a pas pris grand temps avant que Laurence et moi on décampe. Un vieux singe nous poursuivait en nous montrant les dents. Je l’avoue, j’ai eu peur de ces foutus singes.

Puis après vint le désir. Désir de me réapprocher de ces foutus singes pour les voir interagir. Je me suis assise pas trop loin, en demeurant très discrète, et les singes m’ont laissée tranquille. Un des singes a volé la bière d’un touriste pour la caller d'un coup. Jamais je n’aurais cru voir ça.

La morale, c’est que lorsque des Vietnamiens te spécifient ‘‘those monkeys are crazy’’, c’est qu’ils le sont. Habituellement, ils ne s’en font pas pour grand chose. On venait d’escalader un pic rocheux, Laurence croyait trouver la mort là, et les Vietnamiens ne nous avaient même pas précisé de ne pas rester en sandales. La position de Laurence pour descendre était similaire à celle d'une araignée, son centre de gravité ne pouvait être plus bas. Ce n’était pas pour les ‘‘vertigineux’’. Glissant et très escarpé, il fallait grimper dans des échelles à 90 degrés. On s’aggripait comme des singes, les normes de sécurité ne sont pas les mêmes, mais maudit que c’était excitant.

J’ai fini par escalader une tour au sommet du pic, à quelque 300 mètres d’altitude. La passerelle était trouée de partout, c’était chambranlant, mais le désir de voir cette vue écrasait tout le reste. Le désir a donc vaincu la peur, et ça en valait la peine. Vue inoubliable.